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Le blog de LeClochard
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22 septembre 2007

Il n'est jamais trop tard...

    Eh bien! il y a longtemps que je n'avais publié ici. C'est vrai que je préfère lire qu'écrire et que même si j'ai autant de plaisir dans une activité comme dans l'autre, une certaine paresse et pudeur m'interdisent de trop donner dans ce domaine. Je crois que j'ai aussi trop d'estime pour les Anciens. (je sais aussi l'importance des mots) J'ai toujours le souvenir d'eux.  Je sais que je ne serai jamais aussi bon et acide  que Saint Simon -en passant: sa façon intense et pulsionnelle d'écrire est souvent prise pour un mensonge, par erreur  ; il a compris que la fausseté des êtres ne peut être rendue que par l'outrance. Je dois tracer ma voie malgré la vie, mon travail, ma passivité. Je sais que ce n'est pas un modèle mais sa puissance, je la reconnais chez tous les grands. Chacun s'est développé et comme un arbre, selon la variété, le milieu et les conditions, y a pris sa forme propre. (j'adore cette idée : nous sommes comme des arbres.) 

  J'ai bien lu cet été les oeuvres au programme et je dois avouer m'être ennuyé par intermittence en lisant Gracq. Je n'en ai pas honte. Ce n'est pas un officiel (je veux dire un intouchable comme ceux que tout le monde connaît); je dirai même qu'il sert plutôt de signe de ralliement aux précieux. Je n'arrive pas à comprendre qu'un livre où les descriptions diluent à l'envi le récit sans qu'il y ait jamais de réflexions, d'analyses plaisent. Ce doit être le charme de poétique de Balcon en forêt: de longues pages où il s'agit de restituer une atmosphère pour elle-même, comme une soumission du héros à la nature, aux espaces où il se trouve. Le temps semble se suspendre et après un nombre incroyable de pages, on ne sait plus, s'il est passé une semaine ou trois mois. Heureusement pour le lecteur qu'il y a des saisons pour lui indiquer là, c'est l'hiver, là, l'automne. A vrai dire, je suis injuste: l'absence de morale claire me plaît bien. J'aime que les choses parlent par elles-mêmes dans un livre. Je trouve ça plus subtil. Et puis, je ne me sens pas éloigné d'un type qui aime la nature, même si ce n'est pas la mienne. Je le soupçonne d'être un idéaliste: le genre de personne qui écrive pour l'éternité. "Là, je vous donne mon perfection à moi. C'est la forêt de toujours. C'est l'attente absolue telle que l'humain peut la vivre dans ce lieu." Ca expliquerait que cette guerre qu'il repousse au maximun fasse une sorte de contre-point distant et seulement final dans son bouquin. D'ailleurs, de mémoire, un détail m'a étonné chez lui: son goût pour les mots rares. Comme ces amateurs de jardin qui publient dans les magazines, des poèmes ou des descriptions en hommage à leur plants de tomate à la rondeur parfaite, à leur glycine à la floraison grappuleuse ou à leur vigne vierge dont le feuillage rougoie merveilleusement au soleil couchant de l'automne, Gracq prend plaisir à parler du "scion du châtaignier" sur lequel le soldat blessé se repose.

  Je ne suis pas sûr d'être prêt pour les écrits et encore moins les oraux. J'ai fait des explications de texte. J'ai pris des notes. Mais tout cela me semble futil. Je comprends que les ambitieux, ceux qui ont des soucis pécuniaires ou qui s'ennuient cherchent absolument à l'obtenir. Mais je ne suis pas poussé par ces motifs. Pour moi, c'est une sorte de défi qui m'oblige à lire des livres -que je n'aurais pas ouverts d'ailleurs pour certains- sérieusement. 

  J'irai cependant jusqu'au bout: Carine m'a écrit qu'elle préfèrait ne pas se présenter, mais qu'avec moi, elle vivrait par procuration ce concours.  J'espère ne pas être trop humilié par les notes. Croyez-moi, lecteurs, je n'exagère pas.  Dans ce genre de concours, on n'hésitera pas à donner une note basse si ce que je propose n'est pas "à la hauteur". (En passant: il y a une chose que j'ai découverte en devenant professeur. Lorsqu'on donne une note, cela ne signifie nullement que soi-même, on ferait mieux que le candidat qui vous soumet son travail, on donne simplement une appréciation par rapport à un modèle idéal que l'on a en tête. C'est une petite consolation.)

  Cet après-midi, j'ai vu Vingt-huit semaines plus tard au cinéma. Je suis toujours aussi fasciné par ces films qui exposent la fin du monde -de l'humanité, je veux dire- par un anéantissement des hommes par eux-mêmes et par leur faute (je me souviens de la phrase du prêtre à la télévision dans L'Armée des morts: "Quand il n'y a plus de place en enfer, les hommes reviennent sur terre." Phrase d'ailleurs incroyablement vraie si on l'applique à notre situation présente: l'enfer, c'est de vivre sur terre parmi les hommes).

(En passant, je m'interroge: comment peut-on qualifié un mort-vivant de "mort" dans la mesure où il peut ne plus manifester les signes de la vie ? si un tel être peut être qualifié de vivant, que signifie une existence où il n'y a ni reproduction possible, ni création, ni échange mais une existence animée par l'unique but de manger ?  vivent-ils éternellement s'ils ne trouvent plus rien à manger ?...)

  Enfin, dans ce film, il est question d'humains contaminés par un virus qui les pousse à s'entre-dévorer. L'homme est un loup pour l'homme, dit-on.

  Maintenant que j'y pense, je crois que le plaisir que j'y trouve, est contenu dans cette vision de Londres déserte qui laisse penser : l'humanité disparaîtra-t-elle un jour par sa faute ?

                                     poster_1280x1024

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